Causeries au coin de la Caprice : des nouvelles des voies sur berges
Ce mercredi 7 février 2018, la FFAC s’est rendue au Tribunal Administratif de Paris pour ouïr les conclusions du rapporteur public dans le cadre des recours contre la fermeture des voies sur berges.
En effet, la fermeture des voies sur berges a donné lieu à pas moins de 10 recours, lancés par une vingtaine de parties, en vrac : des parisiens, des riverains des quais de Seine, des associations de quartier, de défense du patrimoine, la Région, 4 départements, des élus parisiens, une palanquée de communes, des établissements intercommunaux…
Sont attaqués deux actes : la déclaration d’intérêt général de l'opération d'aménagement des voies sur berges et l’arrêté fermant lesdites voies à la circulation pour les remplacer par une aire piétonne (page 22 du document en lien).
Une fois l'ensemble des requérants identifiés (soit un bon quart d'heure...), la parole est donnée à la rapporteure publique, un magistrat du Tribunal chargé de donner à ses collègues un point de vue objectif en droit pour les éclairer sur la décision à prendre (point de vue que les parties découvrent à l'audience).
D’emblée, la couleur est donnée : le projet de la Mairie de Paris est présenté comme relevant d’une réflexion globale sur l’attractivité de Paris autour de son fleuve, sur le développement d’autres modes de mobilité, d’activités économiques, ludiques, répondant à un désir d’espace de respiration et de promenade, diversifiant les usages de la voie d’eau...
Ensuite, la rapporteure publique a égrené une par une les causes d’irrecevabilité des uns et des autres. Elles furent légion. Au final, seule une poignée de recours a passé les fourches caudines de son examen : la Région, le 92, le 94, le 78, les élus parisiens et un particulier. Pour le reste, il est proposé le vide-ordures.
S’agissant ensuite de l'opération d’aménagement des voies sur berges, TOUS les moyens, sans exception, ont été écartés par la rapporteure publique, quasiment pour un seul et même motif : une enquête publique ou une concertation irrégulière ne peut vicier la décision qui y fait suite que s’il est prouvé que l’irrégularité a nui à l’information du public, ou que l'irrégularité a pu influencer sur le sens de la décision prise par l’autorité administrative (CE Ass. 23 décembre 2011, Danthony, n° 335033).
Traduction en des termes moins juridiques et plus prosaïques : la concertation du public importe peu, sauf énorme boulette.
En effet, prouver qu'une irrégularité a nui à l’information du public est quasiment impossible. L'Etat et les collectivités locales, la Mairie de Paris en tête, tronquent, biaisent, déforment, omettent, mais ne mentent pas.
Quant à prouver qu'une irrégularité pourrait influencer la décision de l’autorité, il faudrait déjà reconnaître que les résultats d’une consultation du public puisse influer sur une autorité publique (les Zadistes, en chœur : « LOL ! »).
Les irrégularités suivantes ont été soulevées par les requérants :
- L’étendue insuffisante du champ de l’enquête publique, limitée à 4 arrondissements, en omettant les 16 autres et la banlieue.
- L’absence d’enquête globale sur les projets de voirie de la Mairie (rive gauche, rive droite, voie Georges Pompidou, etc.) qui ne sont que le tronçonnement d'un projet global (dégager la bagnole développer les mobilités douces).
- L’impact sur la circulation insuffisamment étudiée.
- L’impact sur la pollution laissant de côté des axes majeurs et le phénomène de report.
Aucun de ces arguments n'a été accueilli favorablement par la rapporteure publique qui leur a opposé la jurisprudence Danthony.
Ainsi, les véhicules s’évaporeraient (on aurait plutôt tendance à dire qu'ils se condensent ailleurs, en application de la loi de Lavoisier), il y a Autolib’, des incitations à renoncer à l’auto, des aides pour renouveler son véhicule (alors qu'un véhicule électrique reste un véhicule qui a besoin de routes pour circuler).
Enfin, le plus gros morceau : la théorie du bilan coût-avantage. Autrement dit : la balance des avantages et des inconvénients.
Les avantages de la fermeture : le projet permet de valoriser le fleuve, de protéger la biodiversité, d’améliorer la qualité de vie, d’augmenter la sécurité des usagers de la route, de créer des emplois, de répondre à la demande des parisiens d’un parc et d’activités ludiques en cœur de ville, etc.
Les inconvénients : l’augmentation de la pollution ? Pas démontrée. Du bruit ? Pas démontré. Les reports sur d’autres axes ? Sur les transports en commun ? L’incapacité à absorber ces reports n’est pas démontrée.
La rapporteur publique invite le Tribunal à rejeter les recours contre la déclaration d'intérêt général du projet d’aménagement des voies sur berges.
Quand, soudain, coût de tonnerre.
S’agissant de l’arrêté fermant les voies sur berges, la Mairie s’est fondée sur un texte de loi qui ne l’autorisait pas à fermer les voies 24/24 et 7 jours sur 7. Certes le Tribunal pourrait vouloir pourrait substituer le « bon » texte qui autoriserait cette fermeture permanente, mais cela reviendrait à une substitution des motifs de l’arrêté. Ce qui lui est interdit.
En conséquence de quoi, la rapporteure publique a invité le Tribunal à annuler l’arrêté fermant les voies sur berges.
Et maintenant, quelles suites ?
Tout d'abord, le Tribunal ayant lu les écritures des parties, écouté sa rapporteure, puis les plaidoiries des parties, voit devoir statuer.
Le délibéré sera rendu d'ici une quinzaine de jours.
Si le Tribunal suivait les conclusions de sa rapporteure (il n'est nullement obligé de le faire, mais c'est ce qu'il fait dans 90 % des cas), le projet d'aménagement des voies sur berges serait validé, mais l'arrêté de fermeture des voies sur berges annulé.
Dans une telle hypothèse, la Mairie de Paris pourrait reprendre un nouvel arrêté de fermeture des voies sur berges fondé, cette fois-ci, sur le texte légal qui l'y autorise. Auquel cas, ce nouvel arrêté devrait être combattu sur le fond, ce qui serait d'autant plus dur si le projet d'aménagement des voies sur berges était validé par le Tribunal, comme le lui suggère sa rapporteure.
Une bataille est gagnée, mais pas la guerre. La suite au prochain épisode avec le jugement du Tribunal Administratif de Paris.
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